LES SCEPTIQUES DU QUÉBEC

quackwatch

Allergies: diagnostiques et traitements douteux

Stephen Barrett, M.D.

 

Plusieurs pratiquants de réputation douteuse maintiennent que les allergies alimentaires peuvent être responsables de tout symptôme qu'une personne puisse présenter. Pour appuyer cette prétention -- qui est fausse -- ils font des tests variés qui supposément identifient les aliments en cause. Des prétentions de ce genre peuvent paraître crédibles parce que près de 25% des gens pensent qu'ils ont des allergies alimentaires. Toutefois, des études scientifiques n'ont démontré que seulement 6% d'enfants et 1-2% d'adultes ont réellement une allergie alimentaire, et la plupart des gens ayant des allergies alimentaires sont allergiques qu'a moins de quatre aliments [1]

Tests cytotoxiques

Le plus notoire de ces tests était le test cytotoxique, qui a été popularisé au début des années 1980 par des cliniques devantures, des laboratoires, des consultants en nutrition, des chiropraticiens, et par certains médecins conventionnels. Les partisans prétendaient qu'il pouvait déceler la sensibilité alimentaire, comme cause d'asthme, d'arthrite, de constipation, de diarrhée, d'hypertension, d’obésité, de troubles gastriques, et de plusieurs autres conditions. Toutefois, des études contrôlées n'ont jamais pu démontrer de fiabilité, et certaines études ont conclu qu'il était hautement imprévisible [2-5]. Par exemple, une étude a trouvé que les globules blancs des patients allergiques ne réagissaient pas différemment lorsqu'exposées à des substances connues comme causes de symptômes ou exposées à des substances auxquelles les patients n'étaient pas allergiques [6]. Des mesures gouvernementales régulatrices [7-10] et la publicité négative ont presque totalement éradiqué le test cytotoxique du marché de la santé. Mais quelques pratiquants l'utilisent encore, et plusieurs font appel à d'autres procédures semblables pour déceler "l'allergie alimentaire."

Le test ELISA/ACT

Un autre test prétendu localiser des "allergies cachées" est l'ELISA/ACT, développé par Russell Jaffe, M.D., Ph.D., et fait au Serammune Physicians Lab (SPL), de Reston, en Virginie, que Jaffe dirige. Selon le pamphlet SPL:

Lorsque nous parlons d'allergie possible, nous pensons immédiatement à une réaction dont les symptômes surviennent dans les minutes qui suivent l'ingestion d'un aliment ou produit chimique. Les symptômes incluent l'urticaire et la démangeaison...
 
Les allergies "cachées" ou "tardives" sont plus difficiles à déceler parce que le début des symptômes est retardé de 2 heures à 5 jours et les symptômes peuvent aller de la douleur physique à la fatigue inexpliquée. Des estimés scientifiques sont que jusqu'à 60% de toutes les maladies sont dues à des allergies cachées [11]

Le pamphlet déclare que l'un ou l'autre des conditions suivantes peuvent signifier la présence d'allergies cachées: maux de tête chroniques, migraines, difficulté à dormir, étourdissements, écoulement ou congestion nasale, sécrétions pharyngées ('post-nasal drip'), silement dans les oreilles, maux d'oreilles, vision embrouillée, rythme cardiaque irrégulier, asthme, nausées et vomissements, constipation, diarhhée, syndrôme du colon irritable, urticaire, éruptions cutanées (psoriasis, eczema), douleurs musculaires, douleurs articulaires, arthrite, tension nerveuse, fatigue, dépression, fatigue mentale, difficulté à faire son travail.

L'ELISA/ACt est fait en exposant les lymphocytes du patient à différents aliments, minéraux, préservatifs et beaucoup de substantces environnementales (allant jusqu'a 300 différents items), et en observant comment elles vont réagir. Après que le test est complété, le pratiquant (typiquement un chiropracticien) va recommander des changements dans la diète et des suppléments. SPL maintient une liste de pratiquants référants qui font le test et des distributeurs qui peuvent offrir "des combinaisons spéciales des suppléments suggérés pour réduire le nombre de 'pilules' que vous prenez." En 1994, le profil complet (300 items) avec l'interprétation coùtait $695.00.

Malgre que le test ELISA/ACT puisse évaluer les taux de certaines réponses immunitaires, ces résultats ne sont pas nécessairement reliés à l'allergie et n'on rien à avoir avec le besoin de suppléments qu'une personne pourrait avoir. De plus, beaucoup des symptômes énumérés dans le pamphlet SPL ne sont pas reliés à l'allerge et ne sont pas traités particulièrement avec des suppléments diététiques. [Note: Ce test ne doit pas être confondu avec le test ELISA, qui est un test standard pour certaines maladies infectieuses.]

D'autres tests de valeur douteuse

En plus des tests cytotoxiques et l'ELISA/ACT, les procédures suivantes ne sont pas valides pour le diagnostic et traitement d'allergies alimentaires:

Epreuves appropriées

Le seul moyen approprié d'évaluer une allergie alimentaire soupçonnée ou une intolérance est de commencer avec un questionnaire détaillé des symptômes qui sont attribués à un aliment sur une période de plusieurs semaines. Les symptômes comme l'enflure des lèvres ou paupières, l'urticaire, ou autre éruption cutanée, peuvent être causés par une allergie alimentaire, particulièrement s'ils surviennent dans les quelques minutes (allant jusqu'à deux heures) suivant l'ingestion. La diarrhée peut être un symptôme d'allergie, (si associée à d'autres symptômes) mais peut en soi être un symptôme d'intolérance. Des symptômes vagues comme l'étourdissement, la faiblesse, ou la fatigue ne sont pas reliés aux aliments. Le questionnaire doit tenir compte des aliments soupçonnés, la quantité consommée, l'intervale entre l'ingestion et les symptômes, s'il y a un "pattern" de symptômes suite à l'ingestion, et d'autres facteurs. Malgré que tout aliment puisse causer une réaction allergique, quelques aliments seulement sont responsables de 90% des réactions. Chez les adultes, ces aliments sont les arachides, noix, poissons, et fruits de mer. Chez les enfants, ils sont les oeufs, le lait, les arachides, le soya et le blé [14]

Si des symptômes significatifs surviennent, la prochaine étape doit être d'observer si l'éviction de l'aliment soupçonné dans les prochaines semaines va prévenir les symptômes qui semblent reliés. Si oui, les aliments soupçonnés devraient être ré-introduits un à la fois pour voir si les symptômes vont être reproduits. Toutefois, si les symptômes incluent l'urticaire, les vomissements, l'enflure de la gorge, le wheezing, ou difficulté respiratoire, poursuivre ces tests d'auto-évaluation pourraient être dangereux, et un allergiste devrait être consulté.

L'évaluation médicale appropriée -- faite par un allergiste -- va inclure un questionnaire détaillé de l'histoire et des tests d'allergie avec des extraits d'aliments (fait par la méthode per-cutanée ou par scarification) pour apprécier si un mécanisme allergique est impliqué. Dans les cas ou les tests d'allergie seraient dangereux, un test sanguin, le RAST peut être fait.. Le RAST fait en laboratoire est un test fait sur le sang du patient évaluant la présence d'anticorps à des protéines d'aliments. Ce test est plus coûteux et pas aussi sensible dans la détection d'allergie que les tests cutanés. Un test négatif (soit cutané ou RAST) signifie une probabilité d'allergie basse à l'aliment. Des tests positifs, toutefois, ont un taux de prévisibilité plus élevé [1]

Le seul moyen véritable de diagnostiquer un allergie alimentaire, à un colorant ou additif, est le test de provocation (challenge) à double insue, qui consiste à l'ingestion de l'aliment soupçonné ou un placébo [13]. Ceci peut être approprié si l'histoire du patient suggère une allergie alimentaire et le test cutané ou RAST est négatif. A cause de réactions parfois dangereuses, les tests de provocation doivent être faits en milieu hospitalier ou dans le bureau du médecin, ayant le nécessaire pour traiter la réaction si elle survient.

 

Pour information additionnelle:

 

Références:

  1. Sicherer SH. Manifestations of food allergy: Evaluation and management. American Family Physician 59:415-424, 1999.
  2. American Academy of Allergy: Position statements—Controversial techniques. Journal of Allergy and Clinical Immunology 67:333-338, 1980. Reaffirmed in 1984.
  3. Chambers VV and others. A study of the reactions of human polymorphonuclear leukocytes to various antigens. Journal of Allergy 29:93-102, 1958.
  4. Lieberman P and others. Controlled study of the cytotoxic food test. JAMA 231:728, 1974.
  5. Benson TE, Arkins JA. Cytotoxic testing for food allergy: Evaluations of reproducibility and correlation. Journal of Allergy and Clinical Immunology 58:471-476, 1976.
  6. Lehman CW. The leukocytic food allergy test: A study of its reliability and reproducibility. Effect of diet and sublingual food drops on this test. A double-blind study of sublingual provocative food testing: A study of its efficacy. Annals of Allergy 45:150-158, 1980.
  7. Hecht A: Lab warns cow: Don't drink your milk. FDA Consumer 19(6):31-32, 1985.
  8. Bartola J: Cytotoxic test for allergies banned in state. Pennsylvania Medicine 88:30, October 1985.
  9. Proposed notice: Medicare program; Exclusion from Medicare coverage of certain food allergy tests and treatments. Federal Register 48(162):37716-37718, 1983.
  10. Cytotoxic testing for allergic diseases. FDA Compliance Policy Guide 7124.27, March 19, 1985, revised March 1995.
  11. Do you have hidden allergies? ELISA/ACT can help you. Undated brochure distributed in 1993 by Serammune Physicians Lab.
  12. The ALCAT test: A simple blood test for food and chemical sensitivities (Flyer). Hollywood, FL: AMTL Corporation, 1995.
  13. British Advertising Standards Organization. Adjudication: Allergy Testing Service, May 1999.
  14. Sampson HA. Food allergy. JAMA 278:1888-1894, 1997.

Dernière mise à jour le 9 mars 2019.

Source: Quackwatch