LES SCEPTIQUES DU QUÉBEC

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L'allergie aux produits chimiques de l'environnement: un diagnostic fallacieux

Stephen Barrett, M.D.

Le diagnostic: 'multiple chemical sensitivity' ou MCS (allergie aux produits chimiques multiples) est utilisé pour étiqueter les personnes présentant une foule de symptômes ennuyeux attribués à des éléments de l'environnement. Ces gens font des demandes spéciales, dont compensation pour absence au travail, et plus, dont des poursuites, se décrivant comme 'allergiques' à des aliments ou produits chimiques qui les rendent malades. Leur effort est appuyé par un petit groupe de médecins qui utilisent des méthodes de diagnostic et de traitement de valeur douteuse. Cette pratique est très critiquée, décrite comme factice, et le diagnostic de MCS ne serait pas valide.

Qu'est-ce que le MCS?

Le concept du MCS a été développé par un allergologiste du nom de Theron G. Randolph, M.D. (1906-1995) qui était convaincu que des patients devenaient malades suite à l'exposition à des substances à doses beaucoup plus faibles que celles considérées sans dangers. Dans les années 40, il déclara que les allergies causaient la fatigue, l'irritabilité, des troubles de comportement, de la dépression, de la confusion, et de la tension nerveuse chez les enfants.

Dans les années 50, Randolph suggérait que les humains ne se sont pas adapté suffisamment à des produits chimiques synthétiques modernes ce qui s'est traduit par une nouvelle forme de sensibilité à ces substances. Sa préoccupation qu'il avait déjà avec les aliments s'est étendue aussi à un grand nombre de substances chimiques. Avec les années, la condition qu'il a proposé, a été appelée par plusieurs noms: la toxémie allergique, l'allergie cérébrale, la sensibilité chimique, la maladie écologique, la maladie environnementale, dérèglement du système immunitaire, sensibilité chimique multiple, syndrome allergique total, allergie environnementale totale, syndrome de trouble immunologique total, syndrome de réponse toxique, la maladie du 20e siècle, l'allergie universelle, et plusieurs autres noms qui suggèrent une variété de facteurs comme causes. Ces étiquettes sont aussi liées au syndrome de la Guerre du Golf, la maladie des tours à bureaux scellés, syndrome de tapis toxique, et d'autres diagnostiques très controversés.

Les plaintes associées à ces étiquettes incluent la dépression, l'irritabilité, les changements de comportement, l'inhabilité de concentration ou de penser clairement, mauvaise mémoire, la fatigue, la somnelance, la diarrhée, la constipation, les étourdissements, la fatigue mentale (aussi appelée "la brume cérébrale"), les éternuements, écoulement ou congestion nasale, la respiration sifflante, démangeaison du nez et des yeux, des éruptions, des céphalées, douleur thoracique ou sternale, douleur musculaire ou articulaire, la fréquence urinaire, battements de coeur, manque de coordination musculaire, enflure de plusieurs parties du corps, dérangement d'estomac, sensation d'engourdissement des doigts et orteils, et des expériences psychotiques associées à la schizophrénie. Le docteur William J. Rea, M.D. qui dit avoir traité plus de 20 000 patients atteints de cette maladie environnementale, déclare qu'ils "peuvent manifester n'importe quel symptôme décrit dans tout livre de médecine".

Les partisans du MCS suggèrent que le système immunitaire serait comme 'un baril qui se remplit continuellement de produits chimiques jusqu'à temps qu'il déborde causant les symptômes'. Certains disent aussi qu'un seul épisode sérieux d'infection, de stress, ou d'exposition chimique peut déclencher "un déséquilibre du système immunitaire". Les facteurs possibles de stress peuvent inclure tout de notre environnement, comme l'air urbain, les émanations de diesel, la fumée de cigarette, la peinture fraîche ou le goudron, solvants organiques et pesticides, certains plastiques, les journaux, les parfums et colognes, les médicaments, les gaz pour le chauffage ou la cuisinière, les matériaux de construction, les tissus synthétiques ou "permanent press", les produits de nettoyage, l'alcool à friction, les stylos feutres, les coffres de cèdre, l'eau du robinet, ainsi que les forces électromagnétiques.

Il n'y a aucun mécanisme connu d'interaction adverses entre des taux bas de produits chimiques de structure variée et les nombreux systèmes de l'organisme humain. En plus, si le concept de "l'accumulation corporelle totale" serait valide, la "somme" des petits quantités de produits chimiques non reliés (en plus des infections et stress psychologique) aurait le même effet que des doses massives de produits chimiques uniques - ce qui n'est pas vrai. Comme les médicaments, les produits chimiques ont des effets spécifiques dont l'évolution et la gravité dépendent sur la quantité à laquelle l'individu est exposée.

La plupart des médecins qui diagnostiquent et qui traitent le MCS s'identifient comme des "écologistes cliniques" ou "spécialistes de la médecine environnementale". Environ 400 sont membres de l'American Academy of Environmental Medicine (AAEM, que Randolph fonda en 1965 comme la "Society for Clinical Ecology") qui comprend surtout des médecins et ostéopathes. Les écologistes cliniques jouent un rôle important aussi dans l'American Academy of Otolaryngic Allergy (AAOA) à laquelle Randolph a contribué lors de sa création en 1941.

L'écologie clinique n'est pas reconnue comme une spécialité médicale. La médecine environnementale est une composante de la spécialité de médecine préventive (santé publique), mais les théories et pratiques de l'écologie clinique ne le sont pas. Les critiques de l'écologie clinique maintiennent que: (a) Le syndrôme MCS n'a jamais été clairement défini. (b) aucun mécanisme scientifique acceptable n'a pu être proposé pour lui, (c) aucun test diagnostique a été démontré comme valable [1], et (d) aucun cas n'a été prouvé de façon scientifique comme véridique. Les théories et pratiques de l'écologie clinique ont été critiquées sévèrement par l'American Medical Association [2], par l'American College of Physicians [3], la Canadian Psychiatric Association, l'International Society of Regulatory Toxicology and Pharmacology [4], l'American Academy of Allergy, Asthma and Immunology [5], l'American College of Occupational and Environmental Medicine [6], et par d'autres 'panels' scientifiques de renom qui les ont investiguées. En 1997, le conseil d'administration de l'académie a revisé l'évidence une autre fois, et a conclu que "le lien entre les produits chimiques de l'environnement, les aliments, et/ou les médicaments et les symptômes présentés par les patients est spéculatif et aucunement démontré par des études scientifiques publiées". [7]

Diagnostic et traitement douteux

Le docteur Ronald E. Gots, M.D., Ph.D., qui a fait une revue des dossiers médicaux de plus de cent patients diagnostiqués comme souffrant de MCS, décrit le MCS comme "une étiquette donnée à des personnes qui ne se sentent pas bien pour une variété de raisons et qui partagent la conviction commune que les sensibilités chimiques soient en cause". Il ajoute: "il (le MCS) ne peut pas être classifié comme une maladie. Il n'a pas de caractéristiques consistantes, pas de cause uniforme, et pas de traits objectifs ou mesurables. Il existe parce le patient croit à son existence et un médecin lui a donné son accord". [8]

Le fait que le MCS n'a pas été défini de façon significative n'empêche pas les écologistes cliniques de poser le diagnostic -- typiquement chez tous ou presque tous leurs patients. Leur évaluation diagnostique habituellement inclus un "questionnaire axé sur l'écologie", un examen physique, et des tests de laboratoire. L'histoire de cas peut inclure un long questionnaire qui souligne les habitudes diététiques, et l'exposition aux produits chimiques. Le type et but de l'examen physique ne sont pas clairs, puisqu'aucun élément est lié au diagnostic. Les tests d'allergie usuels sont souvent négatifs.

Le test diagnostique que les écologistes cliniques considèrent le plus important est appelé le test de provocation-neutralisation. Durant la procédure, le patient est demandé de rapporter tout symptôme qu'il ressent suite à l'administration sub-linguale (appliquée sous la langue) ou injectée sous la peau, de concentrations variées des substances soupçonnées. Si des symptômes sont rapportés durant le test, le test est considéré positif. Par la suite, on administre au patient encore à différentes concentrations la même substance jusqu'au moment où le symptôme disparaît ou est 'neutralisé.' Toute une gamme de produits chimiques, hormones, extraits d'aliments, et d'autres substances naturelles, peuvent être prescrites comme agents "neutralisants".

La "neutralisation" ressemble de façon superficielle à la désensibilisation utilisée par les allergologistes (allergologues). Toutefois, les allergologistes font des épreuves et traitent avec des substances qui produisent des réactions allergiques mesurables, tandis que les écologistes posent leur diagnostique sur des réponses purement subjectives.

Des diètes d'élimination et de rotation peuvent être utilisées dans l'espoir d'identifier les aliments causant des problèmes. Des tests de provocation avec un seul aliment peuvent aussi être faits. Dans les cas sévères, les patients du docteur Rea peuvent demeurer pendant plusieurs semaines dans une unité de soins environnementaux (Environmental care units) dans le but d'éviter l'exposition à des polluants aéro-portés et à des substances synthétiques. Après un jeûne pendant plusieurs jours, ces patients consomment des aliments "cultivés organiquement" et sont graduellement exposés à des substances de l'environnement pour connaître lesquelles font réapparaître leurs symptômes.

Plusieurs écologistes cliniques emploient des épreuves reliées à la fonction immunitaire ou à l'exposition à des produits chimiques spécifiques. Des échantillons de sang, d'urine, de matière grasse, de cheveux sont évalués lorsqu'exposés à des substances chimiques environnementales. D'autres épreuves de laboratoire sont faites sur les immunoglobulines, les complexes immuns, nombre de lymphocytes, et le "taux d'enzyme antipolluant". Certaines de ces épreuves n'ont pas de protocole accepté, n'ont pas été standardisées, et aucune n'a pu être démontrée comme ayant un modèle consistant de modification quelconque chez les patients dits atteints du MCS.

Certains traitements sont basés sur des épreuves sanguines qui peuvent déceler des produits chimiques dans des concentrations de parties par milliard. Ceci rend l'interprétation de taux trop bas pour être significatifs cliniquement , comme étant évidence d'exposition anormale et nuisible aux produits chimiques. Si un taux d'une "toxine" est interprétée comme anormal, le patient sera avisé qu'une "détoxification" ou "purification" pourrait être faite pour éliminer ces produits chimiques indésirables. Le régime du traitement peut inclure l'exercice, des bains sauna, douches, massages, enveloppes corporelles d'herbes, des mégavitamines (comprenant habituellement plusieurs grammes de niacinamide par jour), des injections auto-administrées "désensibilisantes", et l'usage de purificateurs d'eau et d'air.

Le test de provocation-neutralisation a été évalué, et considéré comme inutile, dans une étude faite au début des années 80 par des chercheurs de l'Université de Californie. Les tests ont été faits dans les cabinets des écologistes cliniques qui traitaient les patients. Pendant des sessions de 3 heures, les patients recevaient trois injections d'extrait des aliments soupçonnés, et neuf injections de sérum physiologique. Seize patients ont fait partie d'une étude une fois, et deux deux fois. Dans des épreuves non aveugles. i.e. sans groupe contrôle, ces patients rapportèrent des symptômes d'une façon régulière lorsqu'exposés aux extraits d'aliments, et aucun symptôme lorsqu'injectés avec du sérum physiologique. Toutefois, dans des conditions utilisant un groupe contrôle (aveugle), ils ont développé des symptômes avec injections de16 de 60 extraits d'aliments (27%) et 44 de 180 (24%) d'injections de sérum physiologique. Les symptômes accusés suite aux deux types d'injections étaient identiques et incluaient: démangeaison nasale, larmoiement ou brûlement oculaire, oreilles bouchées, sensation de plénitude dans les oreilles, du tinnitus (silement dans les oreilles), sécheresse de la bouche, démangeaison à la gorge, drôle de gout dans la bouche, fatigue, maux de tête, nausées, étourdissements, malaise abdominal, sensation d'engourdissement facial ou au cuir chevelu, serrement ou pression à la tête, désorientation, difficulté à respirer, dépression, refroidissement, toux, nervosité, flatulence, et douleur aux jambes. Les résultats ont démontré clairement que les symptômes accusés n'étaient que des réactions placebo. L'étude a aussi démontré que les doses "neutralisantes" des allergènes en cause n'ont absolument aucun effet. Tous les sept patients qui étaient 'traités' lors de l'expérience avaient des réactions égales suite aux injections d'extraits d'aliments ou de sérum physiologique. [9]

Le psychologue Herman Staudenmayer, Ph.D., de Denver au Colorado, a traité des patients"MCS" pendant plus de 30 ans. Il croit que malgré des personnes très sensibles à plusieurs micro-organismes, à des produits chimiques toxiques, et à des aliments courants, il n'y a aucune preuve scientifique qu'une base immunologique existe pour une allergie globale à des substances environnementales. Durant les années 80, comme Rea, Staudenmayer et son collègue - le docteur John C. Selner, M.D. (allergologiste décédé) ont traité des patients "MCS" en utilisant, comme Rea, une chambre environnementale pour des tests de sensibilité à des produits chimiques aéroportés. Toutefois, ils n'ont pas accepté les théories et pratiques de l'écologie clinique. Utilisant des études à double insu (aveugles) avec groupe contrôle, classiques, ils ont pu démontrer que ceux qui "réagissent de façon universelle" peuvent développer des symptômes multiples en réponse aux procédures diagnostiques sans être allergiques aux différentes substances administrées. Une de leurs études décrit comment ils ont employé la chambre environnementale pour évaluer 20 patients avec symptômes multiples attribués à l'hypersensibilité chimique. Ces patients croyaient qu'ils étaient hypersensibles à l'exposition à des niveaux bas de plusieurs produits chimiques. Quelques-uns d'entre eux auraient été évalués et suivis par des écologistes cliniques et diagnostiqués avec la "MCS". Durant ces tests sans groupe contrôle, les patients rapportaient de façon consistante des symptômes associés à l'exposition soit au travail, à la maison ou ailleurs. La chambre environnementale rendait possible une exposition mesurée à l'air purifié, à ges gazes comprimés, et à un atmosphère contenant des concentrations spécifiques de produits chimiques sans connaître quelle situation était laquelle. Aucun des patients a démontré un pattern de réaction impliquant les produits chimiques supposément responsables de leur symptômes. Dix-huit rapportèrent aucun symptôme au moins une fois lorsqu'exposé au produit chimique soupçonné. Quinze accusaient des symptômes lorsque le produit chimique n'était pas là [10]. En d'autres mots, les patients ont réagit à leur sensations et croyances aux tests, plutôt qu'à la substance en question [11].

En 1999, l'Environmental Health and Safety Council de l'American Health Foundation est arrivé à une conclusion semblable. Après avoir revu l'évidence de plusieurs mécanismes prétendus par lesquels les produits chimiques pourraient causer les symptômes du MCS, le conseil a conclu:

Il n'y avait pas d'évidence convaincante dans aucun cas qu'un mécanisme olfactif quelconque soit impliqué dans un état de sensibilisation ou de provocation des symptômes de MCS. Les parfums et d'autres odeurs pouvaient, toutefois, être associés avec des symptômes attribué par les patients MCS symptomatiques, parce qu'ils sont des stimuli reconnus, mais les parfums n'ont pas été démontrés comme étant la cause dans la définition habituelle [12].

Une étude plus récente a évalué si les patients "MCS" pouvaient distinguer de façon réelle entre des solvants aéroportés et un placebo et s'il y avait des différences significatives dans des paramètres biologiques et neuro-psychiatriques mesurables entre les solvants et le placebo. Durant l'étude, 20 patients MCS eet 17 contrôles ont participé à six séances dans une chambre dite

'challenge' où ils ont été exposés à des émanations de solvants et d'air pur décidé au hasard. Ni les patients ni les évaluateurs ne connaissaient quelles substances étaient utilisées. On n'a pas trouvé de différences précises dans l'identification de la substance à laquelle les sujets avaient été exposés. Il n'y avait non plus de performance cognitive influencée par l'exposition aux solvants ou de différence entre les deux groupes. Il n'y avait pas de différence dans les concentrations de cortisol sanguin dans les deux groupes suite à l'exposition [13].

Le traitement offert par les écologistes cliniques est aussi douteux que leurs diagnostics. Un observateur aurait fait le commentaire que la variété de traitements offerts "semble limitée seulement à leur imagination et création". Leur approche habituelle souligne l'évitement des substances soupçonnées et un changement dans leur style de vie qui va aller de minime à énorme. Généralement, on demande aux patients une modification de leur diète et d'éviter les shampoings parfumés, les lotions après rasage, les antisudorifiques, la fumée de cigarette, les émanations des autos, l'emploi de vêtements, meubles, et tapis qui sont faits avec des fibres synthétiques. Des restrictions extrêmes peuvent aller jusqu'à l'utilisation de masques ayant des filtres de charbon de bois, d'oxygène avec appareils portatifs, d'être confié à la maison pendant des mois, et d'éviter contact avec des membres de la famille. Plusieurs patients sont avisés de prendre des vitamines, des minéraux, et d'autres suppléments. Selon les résultats des tests diagnostiques faits, la thérapie 'neutralisante' peut comprendre l'administration sub-linguale ou par injections d'extraits chimiques.

Les patients MCS s'identifient comme infirmes immunologiques dans un monde hostile d'aliments et produits chimiques dangereux. Dans bien des cas, leur vie devient centrée sur leur maladie. Plusieurs compagnies sont à leur portée avec des aliments "organiques," des besoins personnels sans odeur, des vêtements spéciaux, ou des produits nettoyants particuliers, des matériaux de construction pour eux exclusivement, allant jusqu'à des véhicules spécialement construits pour voyages. Un article récent dans la revue "Reason" décrivait comment une femme portait un masque protecteur pendant qu'elle faisait son marché, et une autre femme qui accrochait son courrier sur la corde à linge pendant des semaines avant de l'ouvrir, pour laisser la chance aux "toxines" de l'encre de s'échapper.

Etudes de certains cas

Plusieurs experts ont étudié les patients MCS et ont conclu que leur problème était psychologique plutôt que physique. Les meilleures données suggèrent que certains facteurs psychologiques prédisposent les individus à développer des symptômes et de chercher quelqu'un qui va leur donner une explication ou cause physique de leurs symptômes. Plusieurs de ces patients souffrent d'un malaise psycho-somatique, un problème émotif caractérisé par des symptômes persistants qui ne peuvent pas complètement être expliqués par une condition médicale connue, quoiqu'assez sévères pour nécessiter un traitement médical ou causer une modification dans leur style de vie. Certains sont paranoïaques et croient que leur problèmes aient des causes externes. D'autres souffrent de dépression, pris de panique, d'agoraphobie, ou d'autre état d'anxiété qui mène à des réactions liées au stress. Beaucoup sont soulagés quand un écologiste clinique leur offre ce qu'ils croient qu'ils ont besoin, et les encourage en s'occupant activement de leur malaise. Toutefois, le traitement qu'ils reçoivent peut leur faire plus de tort que de bien.

En 1986, Abba I. Terr, M.D., un allergiste affilié au Centre Médical de l'Université Stanford, rapporta sur 50 patients qui avaient été traités par des écologistes cliniques pendant en moyenne deux ans. La plupart d'entre eux ont fait une réclamation au "workmen's compensation" pour maladie reliée à leur travail. Leur traitements étaient: changements de diète (74% des patients), extraits d'aliments et de produits chimiques (62%), un médicament anti-fongique (24%), l’administration d'oxygène par appareil portatif (14%). Quatorze des patients avaient été avisés de se relocaliser dans un endroit rural, et quelques uns avaient à prendre des suppléments vitaminiques et minéraux, de la gamma globuline, de l'interferon, des hormones féminines, et/ou de l'urine par la bouche. Malgré les traitements, 26 patients rapportèrent aucune diminution des symptômes, 22 étaient pires, et seulement 2 étaient améliorés [14].

En 1989, Terr a rapporté des observations semblables sur 90 patients, incluant 40 de l'étude précédente. Lui aussi a noté que 32 des 90 patients avaient été diagnostiqués souffrant d' "hypersensibilité au candida albicans" (Candidiasis hypersensitivity) --un diagnostic de vogue à l'époque, considéré "speculative and unproven" (de la spéculation et non prouvé) par l'American Academy of Allergy, Asthma and Immunology [3].

Le psychiatre Donald W. Black, M.D., et collègues à l'Université d'Iowa Collège de Médecine, ont décrit comment un faux diagnostic peut mener à des complications psychosociales, financières, occupationnelles, et psychologiques [15]. Les répercussions psychologiques sont habituellement le résultat de recommandations faites dans le but d'éviter les agents en cause. Les patients par conséquent deviennent restreints et solitaires. Les coûts financiers peuvent être énormes, par exemple, un patient peut être conseillé d'ajouter une pièce "sans danger" dans sa maison, ou de rénover sa maison selon les critères EI ('environmental illness'). La relocalisation peut être coûteuse, surtout s'il s'agit de quitter son emploi ou déménager à des grandes distances recherchant un environnement libre de polluants. Des complications occupationnelles sont possibles si le patient est conseillé de changer ou cesser son emploi à cause d'exposition présumée au lieu de travail.

Un exemple d'un cas qui a aboutit en cours démontre ce qui peut arriver lorsque le problème réel n'est pas traité. En 1991, une décision d'un jury de la ville de New York était d'accorder $489,000 pour dommages actuels et $411,000 en plus pour dommages punitifs à la succession d'un homme qui s'est suicidé à l'âge de 29 ans après des années de traitement par un écologiste clinique de New York. Les témoignages durant le procès ont indiqué que le patient souffrait de schizophrénie paranoïaque qui croyait que "les aliments lui en voulaient". Ce genre de problème mental répond bien à une médication antipsychotique. Toutefois, les témoignages ont précisé que le patient avait été diagnostiqué comme "réacteur universel" ('universal réactor') et que le médecin traitant aurait conseillé, pour la survie du patient, qu'il vive dans un environnement "pur", qu'il suive une diète spéciale, et qu'il prenne des suppléments diététiques [16].

Un autre problème sérieux est le résultat de la mésentente dans les familles en ce qui regarde la valeur des traitements en 'écologie clinique.' Dans un cas que je connais, une jeune adolescente, souffrant de fatigue aurait été diagnostiquée allergique à des aliments, à des produits chimiques, et aux champs électromagnétiques par des écologistes cliniques. Le coût de leurs tests, des traitements et modifications résidentielles s'élevaient à $100,000 durant la première année. Malgré que l'état de la jeune fille empirait, elle et sa mère croyaient totalement au traitement et voulaient le continuer. Le père de cette patiente, qui a conclut que le traitement était inutile, fut forcé de choisir entre continuer à payer pour le traitement ou sa famille qu'il aimait profondément. Avec beaucoup de réticence, il a opté pour le divorce dans le but de se protéger financièrement.

Support raisonnable?

Les groupes de support qui encouragent le MCS, ont globalement tenté de persuader les employeurs et agences gouvernementales d'adopter des politiques qui auraient comme effet d'aider les personnes atteintes de "problèmes causés par les produits chimiques". Leur liste très longue de recommandations incluent: (1) des systèmes de ventilation améliorés; (2) aucun usage de rafraîchisseurs de l'air; (3) aucun usage de pesticides à l'intérieur des maisons, à moins de besoin urgent; (4) éviter l'usage de produits chimiques pour pelouses près des lieux de travail; (5) éviter de fumer au travail ou près du lieu de travail; (6) l'achat de matériaux de construction, mobilier, équipement ou accessoires les "moins toxiques/allergéniques;" et (7) avis au préalable aux employés, que si des rénovations ou nettoyage seraient prévues, de ne pas utiliser de peintures, adhésifs, solvants, shampoing pour tapis, et cires à plancher dans le milieu de travail. Plusieurs patients atteints du MCS demandent que le milieu de travail soit exempt de toutes odeurs. Les patients souffrant du MCS veulent l'abolition des parfums, colognes, et produits hygiéniques parfumés dans le milieu de travail. Toutefois, il n'y a pas eu de réglementation de ce genre pour accommoder ces patients.

Les efforts qui ont été faits pour satisfaire les demandes des personnes sensibles aux produits chimiques n'ont eu aucun effet bénéfique. L'exemple le plus connu est celui de la Maison Ecologique, une résidence de huit unités dite "sans dangers" construite à San Rafael, en Californie. La HUD aurait contribué $1.2 millions au projet qui a coûté au total $1.8 millions. Les occupants ont été sélectionnés par un tirage sur 100 applications à travers les Etats-Unis. Malgré que la maison ait été construite libre totalement de produits chimiques synthétiques, les occupants disaient qu'elle les rendait malades quand même.

En 2000, l'Environmental Protection Agency a rejeté une proposition pour la reconnaissance de MCS comme une maladie et pour la promotion de traitement spécial des personnes qui prétendent en souffrir (proposal to recognize MCS as a disease). Cette proposition est flagrante malgré les connaissances scientifiques et pourrait se traduire par des conséquences légales et économiques sérieuses [17].

Le MCS en cour

Plusieurs réclamations et poursuites ont été produites par les personnes souffrant du MCS ('workers' compensation and Social Security Disability). Malgré le diagnostic non reconnu, les pouvoirs vont passer outre les causes et accorder des bénéfices à un individu qui serait rendu incapable de travailler à cause d'un problème de somatisation ou autre manifestation psychologique.

Plusieurs litiges furent basées sur la conclusion que les expositions aux produits chimiques aient causé la maladie par atteinte du système immunitaire. Cette notion est entretenue et soulignée par un réseau d'écologistes cliniques et d'autres qui interprètent des résultats de laboratoire comme ils le veulent, en concluant que tout symptôme peut être le résultat d'exposition à n'importe quelle substance. Ils prétendent que le système immunitaire puisse devenir hyperactif (ce qui mène à plusieurs symptômes) ou hypoactif ("suppressed") (laissant la personne à risque pour l'infection, le cancer, l'arthrite rhumatoïde, et d'autres conditions). Dans certains cas, il peut s'agir de personnes qui ne sont pas malades physiquement mais qui ont peur que l'exposition à des produits chimiques de l'environnement à faible dose ait affecté leur système immunitaire les rendant suspceptibles au cancer et autres maladies.

Il existe des cas légitimes où l'exposition à des grandes doses ou à de l'accumulation de doses massives de produits chimiques toxiques étaient la cause de blessures et maladies. Mais dans plusieurs cas décrits ci-haut, on présume des désordres du système immunitaire basés uniquement sur des résultats de laboratoire qui auraient décelé des traces d'un produit chimique chez l'individu ou sur des déviations discrètes de la 'normale' dans des épreuves d'un bilan immunologique. Heureusement, une décision en 1993 de la Cour Suprème des Etats-Unis a permis aux juges d'exclure des témoignages qui ne sont pas scientifiques [18] et plusieurs l'ont fait ('many have done so') [19].

Démarches règlementaires

Rea et son associé depuis longtemps, Alfred Johnson, D.O. ont été disciplinés par le Texas Medical Board. En 2007, le board a accusé Rea (a) qu'il utilisait des méthodes d'évaluation pseudo-scientifiques, (b) qu'il a eu négligeance dans ses diagnostics, (c) qu'il a fourni des traitements "ridicules", (d) qu'il n'a pas informé ses patients adéquatement que son approché n'était pas prouvée valables, (e) qu'il pratiquait dans des sphères dans lesquelles il n'avait aucune formation, et (f) qu'il se présentait certifié par un 'board' qui n'était pas reconnu par l'American Board of Medical Specialists [20]. La plainte contre Johnson -- aussi apportée en 2002 -- aurait appelé son traitement "insensé" et l'accusait d'un manque évident de compréhension d'immunologie élémentaire dans son interprétation des tests et des conclusions diagnostiques". [21].

Les deux causes ont été résolues en 2010 avec des ordres médiés acceptés dans lesquels Rea et Johnson acceptaient de reviser leurs formules de consentement informé. La formule de Rea doit déclarer que (a) ses injections contiennent qu'une "impression électromagnétique" des agents en question, (b) que la thérapie n'est pas approuvée par la FDA, et (c) que la validité de sa thérapie est controversée. De plus, il ne doit pas commencer à utiliser des formulations qui contiennent des  quantitiés de substances classifiées comme dangeureuses ou carcinogéniques par le U.S. Environmental Protection Agency, ou toute autre agence règlementaire de l'état ou fédérale [22]. Les accusations non reliées au consentement informé ont été annulées faisant partie de l'entente. Durant l'investigation, Rea a témoigné qu'une solution "d'émanations d'automobiles" qu'il utilisait comme injections était tellement diluée que seulement une "impression électromagnétique" des substances originales demeurait [23].

Johnson, qui dirigeait Johnson Medical Associates à Richardson, au Texas, a été réprimandé, amandé de 4 500$. ordonné de prendre 32 heures de cours d'éducation médicale continue reliés à l'allergie et l'immunologie, et être prêt à soummettre les dossiers de ses patients au Board s'il était investigué dans l'avenir [24]. Le site web de Johnson mentionne qu'il est 'fellow', ancien membre de l'exécutif, et directeur de la formation de l'American Academy of Environmental Medicine.

Conclusion

"Multiple chemical sensitivity" ou MCS n'est pas un diagnostic légitime. Au lieu de prouver leur prétentions avec des études scientifiques bien structurées, les défenseurs du MCS font la promotion par des publications, des programmes de discussions à la télévision ou radio, des groupes de support, des procès, et des maneuvres politiques, comme celle de convaincre des gouverneurs d'état de créer une semaine consacrée au MCS ("Multiple Chemical Sensitivity Awareness Week"). Plusieurs font aussi partie d'un réseau d'actions légales controversées toutes prétendant blessures ou maladies par des produits chimiques de l'environnement.

Plusieurs personnes diagnostiquées avec le MCS souffrent sans aucun doute et sont difficiles à traiter. Des études entreprises faites de façon structurée et scientifiques suggèrent que la plupart de ces personnes ont une maladie psychosomatique et le stress serait responsable des symptômes multiples. Si ceci est vrai-- et je le crois--les patients d'écologie clinique courent le risque d'un faux diagnostic, d'un mauvais traitement, d'exploitation financière, et/ou d'un délai d'un traitement médical et psychiatrique approprié. En plus, les compagnies d'assurance, les employeurs, autres payeurs de taxes, et finalement la population en général, sont envahis par des réclamations douteuses pour incapacité et dommages. Pour protéger la population, les organismes qui émettent des permis de pratique médicale doivent étudier plus à fond les activités et pratiques des écologistes cliniques et décider si la qualité des soins qu'ils donnent dans l'ensemble est admissible les permettant de continuer à pratiquer la médecine.

 

 Information additonnelle

 

Références:

1. The Interagency Workgroup on Multiple Chemical Sensitivity. A Report on Multiple Chemical Sensitivity. Atlanta: Agency for Toxic Substances and Disease Registry, August 24, 1998, p 45.
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3. Terr AI. Clinical ecology in the workplace. Journal of Occupational Medicine 31:257-261, 1989.
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7. Terr AI, Bardana EJ, Altman LC. Position statement: Idiopathic environmental intolerances (IEI). American Journal of Allergy and Immunology 103:36-40, 1999.
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16. Medical malpractice: Treatment of paranoid schizophrenia by "clinical ecology" -- wrongful death -- punitive damages. New York Jury Verdict Reporter 10(23):1-2, 1991.
17. Barrett S. An analysis of the National Environmental Justice Advisory Council Enforcement Subcommittee's Resolution #21 on multiple chemical sensitivity. Quackwatch, Aug 20, 2000.
18. Daubert v. Merrell Dow Pharmaceuticals, Inc. 113 S. Ct. 2786 (U.S. 1993). [Full Text]
19. Staudenmayer H. Environmental Illesss: Myth and Reality. Boca Raton, FL: Lewis Publishers, 1998, pp 317-322.
20. Complaint. In the matter of the complaint against William James Rea, M.D., Aug 24, 2007.
21. Complaint. In the matter of the complaint against Alfed Raymond Johnson, D.O., Oct 22, 2007.
22. Mediated agreed order. In the matter of the complaint against William James Rea, M.D.
23. Deposition of William J. Rea, M.D. May 21, 2010, pp 130-131.
24. Mediated agreed order. In the matter of the complaint against Alfed Raymond Johnson, D.O., March 1, 2010.

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Cet article est tiré de "A Close Look at Multiple Chemical Sensitivity", un rapport détaillé de 64 pages, avec références. Il est disponible chez Quackwatch, Chathan Crossing Suite 107/208; 11312 US Highwaty 15-501 North; Chapel Hill, NC 27517 au coût de 3$ poste prépayée (8$ au Canada). Une version encore plus élaborée peut être retrouvée dans: Chemical Sensitivity: The Truth about Environmental Illness, par Stephen Barrett, M.D., and Ronald E. Gots, M.D., Ph.D.

 

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Cet article a été mis à jour le 18 mars, 2011, mise-à-jour affichée le 15 mai, 2011

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Source: Quackwatch