LES SCEPTIQUES DU QUÉBEC

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Magnétothérapie


«Je ne connais aucun scientifique qui prenne cette affirmation au sérieux(…) Ce n’est qu’une mode. Les bracelets de cuivre, les cristaux, toutes ces calembredaines… Elles arrivent et repartent, et celle-ci va passer, comme toutes les autres.»
Robert Park, de l’American Physical Society
 
 
«Les atomes de fer d’un aimant sont comprimés en un état solide, à une distance d’environ un atome les uns des autres. Dans le sang, il n’y a que quatre atomes de fer pour chaque molécule d’hémoglobine, et une distance trop grande les sépare pour qu’ils forment un aimant. On peut s’en rendre compte facilement en se piquant le bout du doigt avec une aiguille et en déposant une goutte de sang tout près d’un aimant.»
Michael Shermer*
Magnétothérapie

Type de médecine parallèle selon laquelle les champs magnétiques possèdent des propriétés curatives. Certains prétendent que les aimants permettent de ressouder les os plus rapidement, mais on considère surtout qu’ils soulagent les malades de la douleur. Les preuves à ce sujet consistent en des témoignages et des anecdotes, fondées sur «l’effet placebo et sur d’autres effets secondaires à l’usage des aimants» (Livingston 1998). Il n’y a pour ainsi dire aucune preuve scientifique en faveur de la magnétothérapie. Une exception est fortement publicisée, toutefois: une étude à double insu du Baylor College of Medicine, dans laquelle on a comparé les effets d’aimants véritables et placebo chez 50 victimes du syndrome de post-poliomyélite souffrant de douleurs aux genoux. On a constaté une diminution de la douleur sensiblement plus grande chez le groupe expérimental que chez le groupe témoin. Aucune reprise de l’étude n’a encore été effectuée.

Une étude moins publicisée du New York College of Podiatric Medicine a conclu que les aimants n’avait aucun effet sur la douleur au talon. Sur une période de quatre semaines, 19 patients ont porté une semelle moulée contenant une feuille magnétique à l’intérieur de leurs chaussures, tandis que 15 autres patients portaient le même type de semelle, mais sans feuille magnétique. Dans les deux groupes, 60 % des sujets ont signalé une amélioration.

Malgré l’absence quasi complète d’études sur la magnétothérapie, une industrie en plein essor vend des bracelets, bandeaux, semelles, supports dorsaux et matelas magnétiques, en vantant les vertus miraculeuses à leurs produits. Le marché des aimants pourrait bien approcher les 150 millions de dollars par année (Collie). (Lerner affirme que les ventes aux États-Unis approchent la marque du demi milliard, et que le marché mondial de la magnétothérapie rapporte presque deux fois plus.) Les aimants sont en passe de devenir la poudre de perlimpinpin des chiropraticiens et autres «spécialistes de la douleur». L’ancienne potière Marlynn Chetkof, qui vend les produits Biomagnetic de Russell, affirme que les aimants sont plus efficaces que les calmants, et valent mieux que de vivre avec la douleur (Collie). Un ex-entrepreneur en bâtiments, Rick Jones, a tenté à son tour de profiter de la manne et de se relever d’une faillite en lançant une entreprise, Optimum Health Technologies, Inc. pour commercialiser son «Magnassager», un vibrateur portatif comportant des aimants qui coûte la bagatelle de 489 $ US. Selon Jones, son bidule «est plus qu’un simple appareil de massage», car il utilise un champ électromagnétique pour favoriser la circulation du sang en même temps qu’il masse les muscles. Jones a réussi à obtenir de divers investisseurs 300 000 $, qu’il a entièrement dépensés dans le «développement du produit et sa mise en marché». Pas un sou vaillant n’a été consacré à des épreuves scientifiques de l’appareil avant qu’on le lance sur le marché, mais il a tout de même remis 20 000 $ à un physiologiste pour qu’il y jette un coup d’œil, «afin de s’assurer que ce n’était pas qu’un vulgaire gadget» (Kasler).

Cette idée que les aimants favorisent la circulation sanguine est commune chez les partisans de la magnétothérapie, mais rien ne prouve qu’ils aient un effet quelconque sur le sang. Bien que rien ne permette d’attribuer aux aimants autre chose qu’un effet placebo, les théories abondent à propos de leurs incroyables vertus. On dit qu’ils présentent un effet semblable au massage shiatsu, qu’ils agissent sur le fer des globules rouges, que les aimants créent une réaction alcaline dans le corps (Collie). Bill Roper, président de Magnetherapy, prétend que «les aimants ne guérissent pas. Tout ce qu’ils font, c’est remettre le corps dans sont état normal afin que le processus de guérison puisse commencer» (Collie). Comment le sait-il? On ne daigne pas nous le dire.

Quelques apôtres de la magnétothérapie semblent fonder leur croyance sur l’hypothèse métaphysique que toute maladie est provoquée par un déséquilibre ou un manque d’harmonie de l’énergie électromagnétique, et qu’on peut restaurer cet équilibre grâce à des aimants.

Les partisans les plus ardents de la magnétothérapie sont des athlètes comme les golfeurs Jim Colbert et John Huston, des joueurs de football comme John Marino, et des joueurs de tennis comme Lindsay Davenport. Leur enthousiasme repose avant tout sur une rationalisation après les faits. Il est bien possible qu’une ceinture magnétique offre un certain soulagement aux golfeurs souffrant de problèmes lombaires. Au-delà de l’effet placebo ou de l’erreur régressive, la ceinture pourrait offrir un meilleur support, ou procurer un peu plus de chaleur à la région du dos qui est touchée. Autrement dit, elle aurait le même effet sans les aimants. Malheureusement, les athlètes ne sont pas plus forts en épreuves scientifiques que les fabricants de bidules pseudomédicaux.

Il n’y a pas que les athlètes qui s’entichent du pouvoir guérisseur des aimants. Le Dr. Richard Rogachefsky, chirurgien orthopédique à l’université de Miami, dit qu’il a employé des aimants pour quelque 600 patients, y compris des blessés par balles. Selon lui, les aimants «accélèrent le processus de guérison». Quelles sont ses preuves? Il dit qu’il s’en est aperçu en regardant les radiographies. Mais le Dr. William Jarvis, quant à lui, se montre sceptique: «Le médecin qui se fie sur des impressions cliniques ou sur ce qu’il croit voir n’est qu’un nigaud» (Collie). Les scientifiques mènent des études contrôlées en double aveugle pour une bonne raison: ils veulent éviter de s’illusionner.

Le Dr. Mark S. George, professeur agrégé de psychiatrie, de neurologie et de radiologie à la Medical University de Caroline du Sud à Charleston, a mené une étude contrôlée sur l’utilisation d’aimants dans le traitement de la dépression. Comme elle ne portait que sur douze patients sur une période de deux semaines, ses résultats ne veulent pas dire grand-chose, cependant.

Pendant que les ventes de produits magnétiques croissent, quelques études scientifiques à peine se déroulent. L’université de la Virginie met les aimants à l’épreuve dans le traitement de la fibromyalgie. Les universités de Miami et du Kentucky les essaient pour le syndrome du tunnel carpien (Collie). Pour l’instant, du moins, il n’y a aucune raison de penser que les aimants présentent davantage de pouvoir de guérison que les cristaux ou les bracelets de cuivre.

 

Voir également: Erreur post-hoc; Médecine parallèle et Sophisme du pragmatique.

 

 

Dernière mise à jour le 23 août 2019.

Source: Skeptic's Dictionary