LES SCEPTIQUES DU QUÉBEC

Conférence

Conférence du vendredi 13 février 2004

La soirée a débuté avec le mot de notre président, Louis Dubé, qui a présenté l'association des Sceptiques du Québec, fondée en 1987. M. Dubé en a profité pour résumer les buts de l'association : promouvoir la pensée rationnelle et l'esprit critique face aux pseudosciences et aux phénomènes paranormaux. Aujourd'hui, les Sceptiques du Québec comptent environ 400 membres et abonnés.

M. Dubé a spécifié que la croyance paranormale la plus courante est la voyance : l'art de voir le passé, le présent ou l'avenir d'une personne ou encore de prédire des événements futurs. M. Dubé a ajouté qu'il existe une autre forme de voyance, auditive celle-là : la clairaudience, ou l'art d'entendre des messages provenant de l'au-delà. Face aux allégations de voyance, comme face à toute allégation de phénomène paranormal, les Sceptiques du Québec prônent l'approche empirique qui consiste à recueillir des preuves et des données sur l'existence et le fonctionnement de ces prétendus phénomènes, par l'entremise d'observations et d'expériences effectuées dans des conditions contrôlées et dont les résultats sont reproductibles. La méthodologie doit, bien sûr, être adaptée à chaque cas particulier. Les Sceptiques du Québec pratiquent ce qu'ils prêchent : ils offrent la possibilité à tout voyant, comme à toute personne prétendant détenir la preuve de l'existence d'un phénomène paranormal, d'établir cette preuve de manière empirique. En cas de succès, la personne se voit octroyer un prix de 10 000 CAD par les Sceptiques du Québec et se qualifie pour le test de un million de dollars américains offert par la James Randi Educational Foundation (JREF).

Evelyne Gadbois a ensuite présenté le conférencier, Hervé Genge, et sa conférence : « Douter des sciences et redouter les croyances. » « Après l'obtention d'une maîtrise en psychologie (1996) et d'un DEA en acquisition et gestion des connaissances (1997) à l'Université Paul-Valéry ? Montpellier ? France, Hervé Genge immigre au Québec en avril 1999. Depuis, il se consacre à l'enseignement de la psychologie en tant que professeur au cégep Édouard-Montpetit, et à titre de chargé de cours à l'Université de Montréal, où il poursuit des études doctorales - recherche en psychologie. »

Le texte qui annonçait la conférence disait ceci :

Tout chercheur qui lutte contre l'ignorance possède une épée dont les deux tranchants seraient la connaissance accumulée et l'intuition. Son bouclier serait la méthode expérimentale qui aurait pour fonction de le protéger également contre sa propre épée. Sans cela, l'intuition qui lui permet d'émettre des hypothèses se confondrait avec le « gros bon sens » dont tout individu s'estime largement pourvu et sur lequel s'érigent bon nombre d'histoires populaires qui sont loin de satisfaire le scepticisme d'un esprit critique. Ceci me conduit maintenant à vous faire part de ma modeste contribution scientifique.

Étudier les représentations que les individus se font des sciences et des pseudosciences constitue un véritable défi tant ce thème vient heurter les croyances de tout un chacun. C'est pourtant le titre du doctorat que j'ai entrepris au département de psychologie de l'Université de Montréal sous la direction de Serge Larivée. À ce jour, près de 1500 étudiants du secondaire à l'université ont participé à cette étude dont les procédures utilisées ainsi que les premiers résultats vous seront présentés en début de soirée afin que vous puissiez vous faire une petite idée des connaissances dans ce domaine. Sur la base de ces résultats, dans la seconde partie de la soirée, nous entreprendrons une discussion sur les stratégies que les Sceptiques du Québec pourraient adopter afin de faire partager leurs connaissances dans certains domaines sans pour autant frustrer ceux à qui la croyance semble suffire.

La soirée s'est terminée par une période de questions et d'échanges entre l'auditoire et M. Genge.

DOUTER DES SCIENCES ET REDOUTER LES CROYANCES

M. Genge a commencé par présenter le plan de sa conférence :

PRÉAMBULE

1) INTRODUCTION

Problématique
Opérationnalisation
Hypothèses

2) MÉTHODE

Sujets
Matériel
Procédure

3) RÉSULTATS

Transformation des données
Moyenne des approches inconnues
Identification adéquate des 2 types d'approches

4) DISCUSSION ET CONCLUSION

Que peut-on dire de ces premiers résultats ?
Palmarès provisoire
Éléments de rationalisation (résultats provisoires)

5) ÉCHANGES

Période de questions et d'échanges
Suppléments pour la discussion
Débat : comment promouvoir le scepticisme?

PRÉAMBULE

Hervé Genge

La démarche suivie par M. Genge est un très bel exemple de démarche scientifique, ici appliquée aux sciences humaines, avec toute la rigueur et les précautions que cela suppose.

M. Genge s'est demandé si nous pensons et raisonnons tous de la même façon… pour suggérer que la réponse est « non ». Nos « représentations sociales » constituent des filtres perceptifs qui influencent la perception de notre environnement.

Pour illustrer cette affirmation, M. Genge a discuté des syllogismes. Un syllogisme est un raisonnement logique qui comporte trois parties : les éléments appartenant à une catégorie (M; par exemple « les humains »), une caractéristique des éléments appartenant à cette catégorie (X; par exemple « être mortel ») et enfin un élément particulier (m; par exemple « Socrate »). La structure de tout syllogisme est la suivante : « tous les M ont un X et m est un M : donc m a un X. » Par exemple : « tous les humains (M) sont mortels (X) et Socrate (m) est un humain (M) : donc Socrate (m) est mortel (X) ». La logique des syllogismes est universelle : elle est indépendante de la culture et de l'époque. Mais, d'autre part, des études ont démontré que les représentations sociales d'une culture donnée, à une époque donnée, influencent le raisonnement logique, même avec les syllogismes.

On a posé le syllogisme suivant à des habitants de l'Azerbaïdjan, de la Sierra Leone et du Libéria : « tous les Américains portent une arme et John est un Américain : John porte-t-il une arme? » La réponse obtenue fut… « Je ne sais pas, car je ne connais pas John! » Les représentations sociales de ces gens étaient axées davantage sur les rapports sociaux que sur la logique formelle. Précisons que les individus interrogés étaient analphabètes : c'est pour cette raison qu'ils raisonnaient davantage selon une logique empirique. Les individus scolarisés sont, au contraire, conditionnés à utiliser une logique formelle dans de tels cas. C'est donc en fonction de nos représentations sociales que nos trouvons des réponses aux questions et aux problèmes qui nous sont posés.

L'étude de M. Genge auprès d'étudiants du secondaire à l'université visait à révéler les différentes représentations sociales que ceux-ci se font des sciences et des pseudosciences. M. Genge a précisé que les représentations qu'un individu donné se construit sont influencées par trois facteurs :

  1. le système éducatif : orientation, niveau;
  2. la famille et les proches (les proches incluant ami(e)s, conjoint(e) et fréquentations régulières) : représentations, croyances et pratiques religieuses, niveau et type d'études;
  3. les médias : journaux, livres, télévision, Internet.

1) INTRODUCTION

1.1) PROBLÉMATIQUE

M. Genge a d'abord cité la définition des représentations sociales qu'il utilise : « ensemble des connaissances, des croyances et des opinions partagées par un groupe à l'égard d'un objet social donné » (Guimelli, 1994).

Avant de mener son enquête statistique auprès des jeunes, M. Genge a pris soin de définir ce que sont les sciences et les pseudosciences. Les sciences sont les « disciplines ayant pour objet l'étude des faits, des relations vérifiables » (Petit Larousse 2003) alors que les pseudosciences « prétendent être scientifiques sans pouvoir démontrer la validité de leurs propos et (elles) n'utilisent pas l'approche scientifique » (Larivée, 2001).

1.2) OPÉRATIONNALISATION

L'enquête était constituée d'un questionnaire demandant aux répondants de noter les disciplines énumérées, de 1 à 5, selon qu'elles étaient davantage pseudoscientifiques (1 signifiant pas du tout scientifiques) ou scientifiques (5 pour scientifiques). Un espace était prévu pour la réponse « je ne connais pas. »

Pour que les réponses compilées puissent être interprétées de manière significative, il fallait que le choix des disciplines énumérées dans le questionnaire soit fait de manière très rigoureuse. Les disciplines devaient être clairement scientifiques ou pseudoscientifiques. Les disciplines au caractère ambigu devaient être proscrites. Ainsi, le choix des disciplines scientifiques s'est effectué à partir des disciplines qui sont enseignées dans les universités et de celles que l'on retrouve dans les organismes de recherche. Le choix des disciplines pseudoscientifiques s'est fait à partir de sources diversifiées : articles scientifiques, articles dans les médias (journaux, Internet), reportages télévisés, paranormal, etc.

1.3) HYPOTHÈSES

La compilation des réponses devait permettre de valider ou d'invalider les deux hypothèses suivantes :

  1. Si le niveau de scolarité d'une personne est plus élevé, alors cette personne devrait mieux connaître les différentes approches énumérées dans le questionnaire. Autrement dit, le nombre d'approches qui lui sont inconnues ou dont elle n'a jamais entendu parler devrait être plus bas.
  2. Si le niveau de scolarité d'une personne est plus élevé, alors celle-ci devrait identifier plus adéquatement les approches énumérées comme scientifiques ou pseudoscientifiques.

2) MÉTHODE

2.1) SUJETS

1034 sujets, allant du secondaire 1 à l'université, ont répondu au questionnaire. Les étudiants du cégep et de l'université qui ont été sondés font tous partie des programmes de sciences humaines : les autres groupes sont présentement interrogés.

2.2) MATÉRIEL

Dans le questionnaire, il était demandé aux sujets d'indiquer leur programme d'étude, leur sexe et leur àge.

Voici la liste des approches énumérées dans le questionnaire. On y compte 20 pseudosciences et 20 sciences mélangées :

2.3) PROCÉDURE

Plusieurs prétests ont été effectués avant le test véritable.

3) RÉSULTATS

3.1) TRANSFORMATION DES DONNÉES

Il a fallu éliminer, au total, 41 questionnaires auxquels on n'avait pas répondu de manière adéquate. Par exemple, certains répondants se sont amusés à créer des motifs à partir des cases à cocher. D'autres n'ont pas répondu à toutes les questions. Tout bon scientifique doit être aussi critique et rigoureux avec les données qu'avec les théories!

Rappelons que les étudiants du cégep et de l'université qui ont été sondés font tous partie des programmes de sciences humaines : les résultats concernant ces niveaux scolaires sont donc provisoires.

3.2) MOYENNE DES APPROCHES INCONNUES

La compilation des réponses a révélé ceci à propos de la case « je ne connais pas » :

Le nombre d'approches pseudoscientifiques inconnues diminue linéairement entre le secondaire 1 et l'université, la moyenne passant de 7,33 (sur 20) à 2,47 (sur 20). Cela constitue une baisse de 34 %.

Le nombre d'approches scientifiques inconnues diminue entre le secondaire 1 et l'université, la moyenne passant de 2,72 (sur 20) à 0,60 (sur 20). Cela constitue une baisse de 25 %.

Fait intéressant : la décroissance dans le nombre d'approches scientifiques inconnues connaît un point d'inflexion au niveau du secondaire 5. La baisse se fait essentiellement entre le secondaire 1 (2,72 approches inconnues sur 20) et le secondaire 5 (0,69 approches inconnues sur 20).

Observation : le nombre de sciences inconnues est toujours inférieur au nombre de pseudosciences inconnues. M. Genge a supposé que cela était attribuable au fait que l'on enseigne les sciences à l'école et non les pseudosciences.

On n'observe aucune différence significative entre les sexes dans les résultats.

3.3) IDENTIFICATION ADÉQUATE DES 2 TYPES D'APPROCHES

Pour déterminer à quel point les répondants arrivaient à identifier adéquatement les approches en tant que scientifiques ou pseudoscientifiques, M. Genge a calculé la moyenne des notes attribuées aux sciences et aux pseudosciences énumérées dans le questionnaire. Les notes ont ensuite été recodées sur 5 : 0 sur 5 signifiant que les sciences avaient été identifiées en tant que pseudosciences (ou vice-versa) et 5 sur 5 signifiant une identification adéquate des approches en tant que sciences ou pseudosciences.

L'identification adéquate des pseudosciences augmente linéairement du secondaire 1 (3,48 sur 5) à l'université (4,43 sur 5); cela représente une augmentation de 22 %.

L'identification adéquate des sciences connaît un point d'inflexion en secondaire 4. Elle passe de 3,43 sur 5 en secondaire 1 à 3,59 sur 5 en secondaire 4 (augmentation de 5 %), puis augmente jusqu'à 4,41 sur 5 à l'université (augmentation de 18 % par rapport au secondaire 4).

On ne peut établir ici de différence significative entre les sexes dans les résultats, mais seulement des tendances.

4) DISCUSSION ET CONCLUSION

4.1) QUE PEUT-ON DIRE DE CES PREMIERS RÉSULTATS?

Ces résultats seraient « plates » en ce sens qu'ils ne feraient que confirmer ce que le bon sens suggère. Toutefois, ils soulèvent plus de questions qu'ils n'apportent de réponses :

À quoi attribuer les points d'inflexion observés dans les deux courbes concernant les sciences? M. Genge a émis plusieurs hypothèses :

L'accès à la pensée formelle se ferait davantage sentir aux secondaires 4 et 5 : cela entraînerait une augmentation de la pensée critique.

Le fait que les étudiants commencent à s'intéresser au choix de leurs futures options académiques tendrait à accroître leur connaissance des disciplines enseignées dans les institutions scolaires.

Le décrochage scolaire pourrait jouer un rôle, faisant en sorte que les étudiants qui persistent au-delà des secondaires 4 et 5 sont aussi les mieux « avertis » en matière de sciences. Le niveau moyen des étudiants augmenterait de la sorte.

M. Genge est allé plus loin en se demandant si la combinaison

  1. de l'augmentation du niveau scolaire et
  2. du choix d'options utilisant une démarche scientifique

ne tendrait pas à l'édification de deux types de populations. La première raisonnerait de manière préférentielle selon une approche scientifique. La seconde aurait une vision beaucoup moins scientifique et ferait davantage intervenir une certaine forme de pensée magique. Si cette hypothèse était validée, cela confirmerait que nous ne raisonnons pas tous de la même façon et que l'approche scientifique constitue un critère de distinction dans le mode de fonctionnement du raisonnement chez les individus.

Les pistes de recherche actuellement explorées, ou en phase de l'être, sont :

L'orientation : quel est le rôle joué par le choix académique, selon qu'il soit davantage science « dure » ou science « humaine »?

Attribution / praxie : on évalue la prise de décision en pratique (praxie) relativement au sens que les individus attribuent (attribution) en terme de signification à une approche ou à une discipline donnée.

Modèle multifactoriel : il serait souhaitable de réaliser une expérimentation qui permette de déterminer le poids des différents facteurs supposés qui contribuent à l'élaboration des représentations sociales, c'est-à-dire le système éducatif, la famille et les médias (voir le préambule).

Dès la fin de la collecte des données, M. Genge et ses collaborateurs seront en mesure d'évaluer l'existence possible de regroupements de croyances (« cluster groups »). Par exemple, est-ce que les individus qui croient en l'astrologie croiraient aussi, systématiquement, en la numérologie?

Un autre but de ces recherches est la construction d'un modèle descriptif, voire prédictif. Ainsi, sur la seule base de certains facteurs socioéconomiques, il serait possible de prédire le type de croyances des individus.

4.2) PALMARÈS PROVISOIRE

Les notes données ici sont les moyennes; rappelons que 1 signifie « pas du tout scientifique » et 5 signifie « scientifique ».

Les sciences par excellence

Les sciences non identifiées

Le paranormal démasqué

Le paranormal qui paraît normal

4.3) ÉLÉMENTS DE RATIONALISATION (RÉSULTATS PROVISOIRES)

M. Genge s'est demandé comment les individus justifient l'usage ou la tolérance de certaines approches qui se disent scientifiques tout en sachant qu'elles ne le sont pas. Autrement dit, comment les individus font-ils de la « consistance cognitive » (selon l'expression de Festinger, 1957, 1964), c'est-à-dire comment s'arrangent-ils pour paraître cohérents à eux-mêmes? Réponse : par la rationalisation, qui consiste à tenter, après coup, de rendre quelque chose rationnel par des justifications.

Les réponses ont été recueillies par des interviews et des questionnaires (ANOVA). Les rationalisations les plus fréquemment invoquées sont :

Le manque de recherches sur l'approche considérée : telle approche, aujourd'hui qualifiée de pseudoscientifique, finira peut-être un jour par faire ses preuves et par devenir véritablement scientifique.

L'absence de moyens technologiques adéquats empêche les chercheurs de se prononcer convenablement sur la scientificité de l'approche considérée. Par exemple, l'état actuel de la technologie de l'infiniment petit ne permettrait pas de démontrer l'existence de la mémoire de l'eau; l'absence de preuve ne constitue pas une preuve d'absence.

L'argument d'autorité : si telle personne prestigieuse affirme que telle approche est valide, alors cette approche doit réellement être valide.

Et… si c'était vrai!?!

CONCLUSION

M. Genge a conclu sa conférence sur cette remarque : « le passage de ce l'on sait à ce que l'on fait est toujours rationalisable. Cependant, nos rationalisations sont souvent loin d'être scientifiques au sens expérimental du terme. »

5) ÉCHANGES

5.1) PÉRIODE DE QUESTIONS ET D'ÉCHANGES

On a demandé à M. Genge sur la base de quels critères il jugeait que les répondants avaient identifié correctement ou non les approches en tant que sciences ou pseudosciences. Autrement dit, comment M. Genge avait-il au préalable coté les approches énumérées pour établir leur degré de scientificité. M. Genge a répondu que ce qui l'intéresse n'est pas tant de coter ou de catégoriser ces approches que de découvrir comment les étudiants, du secondaire à l'université, se les représentent.

Une autre personne a demandé si une discipline pouvait se situer entre les deux extrêmes, c'est-à-dire être à la fois un peu scientifique et un peu pseudoscientifique. M. Genge a répondu que oui. Par exemple, la psychologie n'a pas été mise dans le questionnaire : la psychologie expérimentale est bel et bien scientifique, mais la psychologie clinique l'est moins. Ainsi, pour certaines disciplines, les étudiants avaient raison d'attribuer une note de 2 ou 3.

On a fait remarquer que les tenants de certaines approches non scientifiques paient pour avoir des chaires à l'université dans le but de faire passer leur approche pour scientifique. Par exemple, il arrive que l'on paie des professeurs d'université pour enseigner l'homéopathie dans leurs cours. Une telle démarche est fondée sur le sous-entendu que si c'est enseigné à l'université, alors c'est scientifique. La personne qui a fait cette remarque voulait signifier à M. Genge que lorsque l'on veut établir le degré de scientificité d'une discipline, le fait que celle-ci soit enseignée à l'université est un critère qui peut ne pas être fiable. M. Genge a répondu qu'il était conscient de cela et en avait tenu compte. M. Genge a cité comme exemple le doctorat en sociologie d'Élizabeth Teissier qui portait sur l'astrologie : il ne faut pas considérer l'astrologie comme discipline scientifique pour autant. Pour qu'une discipline puisse être classée comme scientifique, elle doit souscrire aux principes de vérifiabilité et de reproductibilité : il est alors possible de remettre en doute les lois et les hypothèses traitées dans ces disciplines. Mais lorsqu'une discipline repose sur des principes qui sont simplement énoncés comme vrais sans être vérifiés ou vérifiables, alors celle-ci est considérée comme non scientifique.

Une autre personne a soulevé la possibilité que l'université et la société puissent devenir davantage superstitieuses et finissent par reconnaître comme scientifiques des disciplines qui ne le sont pas. Ainsi, le choix des disciplines scientifiques et non scientifiques du questionnaire, étant basé sur ce qui est reconnu comme scientifique ou non par l'université et le dictionnaire, pourrait ne pas être fiable. M. Genge a répondu qu'il est allé voir plus loin que cela : comme dit précédemment, la nature des méthodes utilisées par les différentes disciplines a été prise en compte. Le conférencier a ajouté que le jugement émis sur la scientificité des disciplines allait, par le fait même, au-delà des questions linguistiques, c'est-à-dire de ce qui est officiellement défini et reconnu comme scientifique ou non.

On a souligné que la démarche scientifique est en soi quelque chose de clairement défini :

  1. observations,
  2. hypothèses,
  3. prédictions établies à partir des hypothèses par des déductions logiques et
  4. vérification des prédictions.

On ne peut remettre en question cette définition de la démarche scientifique. Pour déterminer si une discipline est scientifique ou non, il faut aller au-delà de ce qui est défini comme tel et voir comment ceux qui la pratiquent appliquent adéquatement ou non la démarche scientifique. C'est aussi sur ce critère qu'on peut évaluer l'évolution d'une discipline. Une discipline non scientifique deviendra scientifique si ceux qui la pratiquent se mettent à appliquer adéquatement la démarche scientifique. À l'inverse, une discipline déjà scientifique perdra son statut si ceux qui la pratiquent changent leurs méthodes. Un autre élément à considérer est la manière dont les gens extérieurs à une discipline interprètent le travail des spécialistes de cette discipline. Pour que le degré de scientificité d'une discipline soit correctement déterminé, il faut que cette interprétation soit juste.

C'est donc par la démarche que l'on détermine si une discipline est scientifique ou non, la démarche scientifique reposant sur le critère de vérifiabilité. Cependant, la méthode peut varier d'une discipline à l'autre : par exemple, l'archéologie ne peut pas recourir à une méthode expérimentale comme la physique, mais elle est tout autant scientifique, car elle est fondée sur la même démarche de vérifiabilité de ses hypothèses.

M. Genge s'intéressait aux moyennes. Il s'attendait à ce que la note moyenne attribuée aux 20 disciplines scientifiques tende vers 5 et celle attribuée aux 20 disciplines pseudoscientifiques tende vers 1. C'est avec les moyennes qu'on raisonne.

Un participant a affirmé qu'on ne peut pas établir un degré de scientificité de 1 à 5 : ou bien une discipline est scientifique ou bien elle ne l'est pas. Cette personne a aussi souligné la tendance erronée qui consiste à considérer scientifique toute discipline qui emploie des nombres, effectue des calculs ou recourt à des ordinateurs, comme l'astrologie.

On a souligné la possibilité que, pour bien paraître devant les autres, certains répondants aient prétendu connaître une discipline dont ils ne savaient à peu près rien. On avait demandé aux gens d'être le plus sincère possible.

On a fait la distinction entre une science et un art. Par exemple, la médecine est un art, ou encore une technique, basé une science, la biologie. Le but de la médecine n'est pas de mieux connaître le corps humain, mais de le soigner. De même, le génie est un art basé sur la physique. Tout ne peut pas être réparti entre science et non-science. Une pseudoscience est une discipline qui se prétend scientifique sans l'être.

5.2) SUPPLÉMENTS POUR LA DISCUSSION

SUPPLÉMENT 1 : QU'EST-CE QUI FAIT SON SUCCÈS?

Il s'agit d'un individu qui raconte des histoires simples, des anecdotes, des exemples tirés de la vie quotidienne. Il a l'apparence d'un grand père sympathique, du Père Noël, d'un sage. Il est un plaisantin énergique. Il est près de nous. Il simplifie les grands nombres… et il est tellement populaire que même les adeptes des pseudosciences tentent de se l'approprier en interprétant ses propos à leur avantage! C'est… Hubert Reeves.

M. Genge s'est intéressé à la manière dont Hubert Reeves réussit à transmettre des notions complexes d'astrophysique à un public général. M. Genge suggère aux sceptiques d'adopter sa méthode : pour réussir à bien transmettre l'esprit sceptique, il ne faut pas s'attaquer à la croyance de l'autre, car l'autre se met alors sur la défensive et se ferme à la discussion. Le message passera mieux si on soulève et explique les problèmes et ambiguïtés reliés à sa croyance.

M. Genge a souligné que certains chefs politiques consultent des astrologues ou des voyants. Cela l'a amené à se demander qui est-ce qui nous dirige réellement : les politiciens ou les astrologues et autres voyants?

SUPPLÉMENT 2 : RECHERCHE MENÉE ACTUELLEMENT

La recherche actuelle se fait auprès d'étudiants du cégep et de l'université et se concentre sur les programmes de sciences humaines et de sciences de la nature. Comment le fait de fréquenter tel ou tel programme influence-t-il les représentations sociales des 40 approches? Cette recherche vise aussi à établir une différence entre les sexes dans les représentations sociales des sciences et des pseudosciences. Elle veut déterminer l'influence du contexte familial, du contexte social et de l'état civil sur ces représentations sociales. Par exemple, est-ce qu'une personne issue d'une famille où l'on croit à l'astrologie croira aussi à l'astrologie? On demande en plus aux répondants d'identifier, parmi les 40 approches, deux qui pourraient devenir scientifiques au cours des 10 prochaines années et de justifier leur réponse. On pose trois dilemmes éthiques aux répondants dont le but est d'évaluer la manière dont ils raisonnent par rapport aux pseudosciences.

Par ses études, M. Genge veut aussi savoir si les représentations sociales des sciences et des pseudosciences acquièrent une stabilité au cours du développement, et si oui, à quel stade.

5.3) DÉBAT : COMMENT PROMOUVOIR LE SCEPTICISME?

M. Genge a demandé si les membres de l'assistance avec des suggestions ou des propositions.

A) RAISONS DE CROIRE

On a précisé que ce sont en général les mêmes types de rationalisations et d'argumentations qui sont utilisées pour défendre les pseudosciences. L'étude de M. Genge va contribuer à mieux comprendre ces justifications, ce qui, en retour, devrait permettre aux sceptiques de mieux les déjouer et de mieux faire passer leur message.

Nos croyances font partie de nos représentations mentales de la réalité. Elles sont étroitement connectées avec le sens que nous donnons à notre vie, au sens de notre identité, à nos valeurs, à nos actions, etc. Ainsi, remettre en question nos croyances se trouve à remettre en question énormément de choses importantes et peut nous ébranler. Cette personne de l'assistance parlait par expérience!

Il est plus facile de croire une astrologue qui va nous dire que nous allons rencontrer la personne de notre vie dans six mois… que d'aller voir un psychologue qui va nous conseiller quoi faire et quoi changer en nous pour augmenter nos chances de rencontrer quelqu'un et qui va nous dire que c'est possible que l'on rencontre un jour comme c'est possible que l'on ne rencontre jamais : il faut s'arranger pour être heureux dans un cas comme dans l'autre.

S'il est si difficile de convaincre les gens de devenir sceptiques, c'est que l'état naturel de l'humain est la crédulité. Un bébé doit croire ses parents. La crédulité fait partie de la nature animale de l'humain, alors que le scepticisme fait partie de la nature humaine de l'humain.

Une personne de l'assistance connaissait des gens brillants qui consultent des voyants. Elle doute qu'il soit possible d'amener les croyants à réfléchir de manière critique à leurs croyances. Elle a tenté d'argumenter de manière logique avec ses amis, mais ceux-ci semblaient insultés que l'on remette en doute leurs croyances. M. Genge a mentionné une étude qui a montré que beaucoup de membres de Mensa, un club qui réunit les gens ayant les plus hauts quotients intellectuels, croient à la télépathie. Une membre de Mensa, présente sur place, a contesté cette étude.

B) NATURE DE LA VÉRITÉ

On s'est demandé si un vrai sceptique croit que certaines questions n'ont pas de réponse, ou au contraire croit qu'il est possible de trouver des réponses rationnelles à toutes les questions.

C) STRATÉGIES DE COMMUNICATION

Une personne a mentionné que plusieurs croyants justifient leur croyance en disant qu'elles leur font du bien et les rendent heureux. On a alors suggéré de promouvoir le scepticisme en affirmant que ce qui nous rend heureux et nous fait du bien… c'est de ne pas y croire!

On a parlé du suicide homéopathique qui avait déjà été tenté par les Sceptiques du Québec. Jean-René Dufort a également publié un article sur de telles expériences. De telles expériences constituent une manière concrète et accessible de démontrer la non efficacité des pseudosciences.

Une autre personne a affirmé que, selon elle, il n'y a rien à faire avec les adultes. Les adultes n'écoutent que ceux qui sont convaincus des mêmes croyances. Chez les adultes, tout est déjà construit et figé : les adultes ont développé des croyances dont ils ont besoin. Les sceptiques doivent axer leur action sur les jeunes.

Avant de chercher à convaincre une personne de cesser de fréquenter les voyants, il faudrait chercher à comprendre ses motifs. Le problème ne serait pas tant le voyant que le fait que la personne qui consulte se sent démunie devant une situation qu'elle vit. On serait alors en mesure de lui proposer des solutions alternatives. M. Genge a ajouté qu'il a lui-même déjà consulté une voyante : les voyants sont très attentifs au langage non verbal et à toute information qui pourrait être véhiculée implicitement par la parole. C'est ainsi qu'ils découvrent des choses sur nous à notre insu, peuvent nous faire croire qu'ils ont un pouvoir et sauront quoi dire pour nous satisfaire.

Comment faire valoir le point de vue sceptique? Il faut plutôt chercher à se changer soi-même que chercher à changer les autres : nous avons un contrôle sur nous-mêmes, mais pas sur les autres. Un sceptique doit donc accepter que des gens croient à toutes sortes de choses. Un sceptique devrait toutefois préciser que bien que les gens ont le droit de croire ce qu'ils veulent… ils n'ont pas nécessairement raison de le faire. Que recherche-t-on? La vérité ou nos désirs? Si ce qui nous intéresse est de nous représenter la réalité à notre convenance, cela est légitime, sauf qu'alors nous n'avons pas le droit de prétendre chercher la vérité. Chercher la vérité implique de garder un certain détachement par rapport à ses idées : il faut être prêt à remettre en question des idées qui nous sont chères et être prêt à adopter des idées qui peuvent nous déplaire. Le désir de croire est probablement l'un des pires obstacles au jugement éclairé : on prend souvent notre désir de croire pour un critère de vérité.

Un membre des Sceptiques de longue date est arrivé à la conclusion que c'est peine perdue que de tenter de convaincre les croyants d'abandonner leurs croyances. Selon lui, le rôle des sceptiques serait plutôt de faire de l'induction psychologique. Qu'est-ce que l'induction psychologique? C'est l'adhésion à la norme, ou encore le conformisme social. C'est le fait qu'il est extrêmement difficile de croire ou de ne pas croire en allant à contre-sens des tendances sociales. Si tout le monde y croit, alors moi aussi je devrais y croire! Par exemple, une étude a montré que les enfants cessent de croire au Père Noël vers l'àge de 7 ou 8 ans. Selon cette étude, la raison est sociale : beaucoup d'enfants abandonnent cette croyance vers cet àge, alors ceux qui continuent de l'entretenir ont peur de passer pour des naïfs. Ces derniers finissent par abandonner leur croyance non parce qu'ils auraient enquêté sur l'existence du Père Noël, mais par induction psychologique. Le rôle des sceptiques consisterait à démontrer qu'il n'est pas déraisonnable de ne pas croire aux pseudosciences… et même qu'il est sensé de ne pas y croire. S'il y a des gens qui n'y croient pas, alors moi aussi je pourrais ne pas y croire! Les sceptiques doivent faire valoir le point de vue sceptique de sorte à créer un milieu dans lequel les gens qui commencent à douter pourront se sentir à l'aise… sans douter de leur santé mentale!

On a aussi donné un bel exemple de conformisme social. Des études ont montré que dans certains petits villages, tout le monde va à la messe. Peu de gens sont véritablement croyants, mais chacun croit que les autres sont croyants.

Convaincre est difficile : plutôt que de chercher à convaincre, il faudrait donner aux gens des outils pour qu'ils distinguent les vrais voyants des faux. Par exemple, on peut tendre des pièges aux voyants : on peut leur parler de notre soeur malade lorsque nous n'avons pas de soeur. À ce sujet, le numéro 38 de la revue « Le Québec sceptique » contient un article intitulé « 12 façons d'identifier un charlatan. » Si les gens réalisent qu'ils ne trouvent pas de vrais voyants, ils remettront sans doute leurs croyances en question. Beaucoup de croyances se font et se défont en fonction du vécu. Une forme d'agnosticisme pourrait alors remplacer les croyances. On ne peut pas convaincre, mais on peut inciter les gens à douter et à se poser des questions. Certaines personnes ont toutefois un besoin immense de croire et ne seront pas réceptives à des démonstrations.

Lorsque l'on veut promouvoir X par rapport à Y, on peut adopter deux approches possibles.

  1. On peut tenter de descendre Y, mais Y ne se laissera pas faire et cela créera des conflits. On a reproché aux sceptiques de souvent agir de la sorte.
  2. On peut tout simplement promouvoir X : il s'agit d'élever la pensée rationnelle tellement haut que les gens se diront qu'ils n'ont plus besoin de Y.
D) PRÉCISIONS SUR LA SCIENCE

M. Genge a précisé que les sciences ont un côté idéaliste, au sens philosophique. Les sciences construisent des modèles qui sont sensés représenter la réalité, sachant très bien que la réalité est en elle-même inaccessible.

Une personne a remarqué que les gens tendent à devenir sceptiques envers… la science, lorsque celle-ci leur dit des choses déplaisantes. Ils exigent alors de grandes preuves. On a donné comme exemple le réchauffement planétaire et la nécessité de changer notre comportement quant à l'utilisation de la voiture. Autre exemple : les gens vont en général opter pour la simplicité plutôt que la complexité ou l'incertitude, ce qui donne un avantage aux pseudosciences sur les sciences. On préfère les explications simples aux mystères complexes.

Lorsque l'on s'intéresse aux sciences, il faut surmonter certains aspects rébarbatifs : équations, nombres, théorèmes, etc. Hubert Reeves réussit à montrer qu'il y a une certaine poésie dans cela. La science implique certains principes métaphysiques. Certains croient, par exemple, que le déterminisme va à l'encontre du libre arbitre. Or cette conception est fausse : déterminisme et libre arbitre ne sont pas incompatibles. Si les sceptiques réussissaient à faire passer ce genre d'idées, alors les gens seraient peut-être mieux disposés envers le déterminisme.

Un étudiant universitaire en psychologie était content que sa discipline ne fasse pas partie du questionnaire. Il a affirmé que la psychologie n'est pas une science, mais qu'il se bat pour qu'elle en devienne une. Beaucoup de psychologues, sans adhérer aux pseudosciences, entretiennent des croyances face aux approches et aux méthodes d'intervention et ne montrent pas d'intérêt envers les données témoignant de l'efficacité ou du manque d'efficacité de ces approches et méthodes. Seulement 5 % des étudiants en psychologie seraient prêts à changer leurs croyances et opinons en fonction des données : les autres 95 % seraient imperméables aux démonstrations scientifiques. Près de 50 % des professeurs seraient dans cette même situation. Les sceptiques devraient s'interroger sur ce qui fait qu'une personne va décider de tenir compte des données et de leur reconnaître leur juste importance.

Il n'y a pas « les sciences », mais « la science » avec sa démarche. Ensuite, il y a les objets auxquels on applique la science. Si la psychologie n'est pas une science, c'est peut-être parce qu'on applique mal la science à l'objet étudié, qui est « mou ». Il n'y a pas la « science dure » et la « science molle » : il y a seulement « la science ». Ce sont les objets étudiés qui peuvent être plus ou moins mous. Il est par exemple plus facile d'étudier l'anatomie que le comportement.

La science n'est pas une croyance comme les autres : elle se distingue par deux critères majeurs.

  1. La science est esclave des faits.
  2. Les conclusions de la science sont toujours provisoires : cela n'est pas une faiblesse, mais une grande force qui permet à la science d'avancer.

Cependant, la méthode scientifique elle-même n'est pas provisoire : elle est absolue. En science, on ne prétend pas être sûr de quelque chose hors de tout doute, mais hors de tout doute raisonnable, c'est-à-dire à l'intérieur des limites de la raison. Et justement, la raison a des limites. On a ajouté que certaines questions ne relèvent pas de la science, comme les questions de morale, de bien ou de mal. Mais à l'intérieur de ses capacités, la science est imbattable.

Quelqu'un n'était pas d'accord avec l'affirmation que toutes les conclusions de la science sont provisoires. Il faut certes distinguer les théories établies des théories frontière. Mais une fois qu'une théorie a survécu à l'épreuve du temps, elle devient certaine et définitive… à l'intérieur d'un certain domaine du réel. La découverte ultérieure de faits qui contrediraient cette théorie établie ne viendra pas remettre la théorie elle-même en question, mais ce que nous croyons être les frontières de son domaine de validité.

Une personne a souligné qu'utiliser la démarche scientifique pour démontrer la validité de la démarche scientifique est une tautologie. Les faits sont à la science ce que les miracles sont à la religion. Une autre personne a contesté cette affirmation, précisant que la démarche scientifique fait appel à quelque chose d'extérieur à elle-même : la réalité objective, indépendante des humains. On peut se demander, en philosophie, si une telle réalité objective existe. Mais si on se met d'accord que c'est le cas, alors on doit accepter que les faits objectifs, indépendants des humains et desquels la démarche scientifique est esclave, permettent de comparer de manière valide les résultats effectivement atteints par les démarches religieuses, philosophiques et scientifiques. Comparons donc les changements obtenus gràce à la démarche scientifique en quatre siècles à ceux obtenus par les démarches religieuses et philosophiques en plusieurs millénaires!

La croyance est quelque chose qui peut faire du bien au niveau psychologique. La science est quelque chose d'efficace qui permet d'atteindre des résultats : de l'éclairage, des ponts qui ne s'effondrent pas, des paratonnerres qui diminuent le nombre d'incendies, etc. Aucune croyance ne peut empêcher la foudre de tomber sur un immeuble : un paratonnerre le peut.

E) MISES EN GARDE

Il y a toujours quelqu'un qui est le sceptique de quelqu'un d'autre. Nous pouvons être sceptiques dans un domaine que nous connaissons bien, mais être crédules dans un autre domaine.

Quelqu'un a fait cette mise en garde : les sceptiques reprochent le prosélytisme des églises auprès des jeunes. Ils ne devraient pas verser eux-mêmes dans le prosélytisme! Il faudrait également laisser rêver les jeunes du primaire. Inculquer l'esprit critique devrait débuter au secondaire. Une autre personne a rétorqué qu'il faudrait, au contraire, inculquer la démarche scientifique et la résolution de problèmes dès l'àge de 4 ans. M. Genge a souligné qu'un des problèmes dans la transmission de l'esprit scientifique aux jeunes réside dans les croyances des enseignants eux-mêmes.

Un individu a demandé s'il fallait privilégier la vérité à tout prix. Par exemple, plusieurs personnes se sentent réellement mieux en prenant des médicaments homéopathiques, gràce à l'effet placebo. Amener ces gens à réfléchir de manière critique sur l'homéopathie pourrait les priver de ce mieux-être. M. Genge a répondu en citant la conférence de François Filiatrault sur l'effet placebo. La question soulevée ici est d'ordre éthique. Est-ce que ça vaut le coup de risquer que les gens soient plus malades? Les solutions alternatives aux produits homéopathiques coûteraient-elles plus cher?

Il faut éviter le scientisme, qui consiste à croire que la science peut tout expliquer.

Article rédigé par Daniel Fortier.

Daniel Fortier tient à remercier Hervé Genge de lui avoir fourni les notes qu'il a utilisées pour sa conférence.

Daniel Fortier tient aussi à remercier Louis Dubé pour lui avoir suggéré les 5 catégories dans lesquelles les interventions de la section « 5.3) Débat : comment promouvoir le scepticisme? » sont regroupées.